Dans cette quatre partie de l’entretien exclusif avec Galiou Soglo, l’interviewé récuse que l’on limite les performances du Bénin à l’avènement de Patrice Talon en 2016. Lisez ci-dessous cette 4 ème partie que nous vous proposons.
Que répondez-vous a ceux qui disent que Talon est le bâtisseur du Bénin?
Galiou Soglo : (Sourire et un temps d’arrêt). Je dis que Nicéphore Soglo est le père du Bénin moderne. C’est une réalité. C’est lui, qui face aux recettes d’État insuffisantes a créé la TVA à 18 %. Elle n’existait pas. C’est lui qui a supprimé rappelez-vous la TVM, la Taxe sur les véhicules motorisés que nous avons aujourd’hui de nouveau à payer.
Aujourd’hui, quand on entend les gens nous parler de routes par ci et routes par là, mais rappelez-vous on appelait Cotonou « Cototrou ».
Mais quand on entend des responsables de ma génération raconter des incongruités, on ne doit pas se taire. On doit rappeler à notre jeunesse un devoir de mémoire. Non le Bénin n’existe pas depuis l’arrivée de Patrice Talon en 2016. Le Bénin existe depuis la nuit des temps. Et chaque président a fait sa part.
Vous allez nous dire que le CNHU sous le le président Maga n’a pas
existé? A l’époque, c’était l’un des fleurons de notre pays.
Donc vous voyez, ce n’est pas parce que vous êtes au pouvoir que vous voulez y rester pour les délices du pouvoir qu’on doit dire des contre-vérités.
Je l’ai dit auparavant. Moi mon père était chef de l’État. Pourtant, j’ai gardé mon état d’esprit. Mais il faut un peu de retenue et absolument rappeler aux uns aux autres ce que l’État du Bénin était en 1990.
Aujourd’hui, je dirais sans vouloir insulter quiconque que vous mettez un Béninois ministre de l’Economie et des finances, il fera le job parce que simplement il y a les marchés financiers qui vous permettent d’emprunter sur les marchés des capitaux. Vous n’avez pas besoin d’être un surdoué pour faire le job.
L’économie mondiale regorge de financements mais qui vous souviennent que dans les années 1990 quelles étaient nos sources de financement?
Ce n’est pas parce qu’on a dit que le Bénin a droit à une prime à la démocratie que tout était facile.
Les bailleurs ont mis de
l’argent parce qu’ils avaient confiance au regard de la vision du gouvernement d’alors.
C’est de cela dont il s’agit. Rappelez-vous qu’on avait trois leviers. Il y avait le multilatéral par la Banque mondiale et le Fond Monétaire. Ensuite, on bénéficiait de l’axe bilatéral (entre un pays et un autre) et enfin, il y avait l’autre levier qui était celui du Club de Paris et du club de Londres.
De nos jours, vous pouvez vous lever
emprunter des milliards sur le marché des capitaux, mais là encore c’est un danger parce qu’on a vu des pays qui ne s’en sont pas remis.
Regardez l’Argentine. Elle est aujourd’hui engluée dans une crise financière qui découle des prêts de
1980.
Et je rappellerai qu’il y a quelques semaines de cela, l’économiste ivoirien de renom, Tidjiane Thiam rappelait que nos économies devraient plus être soutenues par le capital interne c’est-à-dire les assurances, les fonds de pension que par les emprunts.
Donc, j’aimerais rappeler aux uns aux autres (ils ne sont peut-être pas
financiers économistes), mais de savoir raison garder et de ne pas raconter tout et n’importe quoi.
Vous voyez quand on se
gargarise de taux de croissance de 6 % alors que dans le même temps votre population crève de fin où vous avez une explosion des prix des denrées de première nécessité, je me dis mais qu’auraient-ils fait s’ils avaient été à la place de
Nicéphore Soglo ?
Quand il y a eu la dévaluation vous vous rappelez malgré cette dévaluation qui a renchéri les
coûts des matières de première nécessité qu’on importait, le Bénin a pu juguler la crise. Résultat, on était en 1995 à 6 % de taux de croissance malgré la dévaluation.
Donc, je tiens quand même à rappeler aux uns et aux autres de cesser de faire économie de vérité en ne racontant pas tout et n’importe quoi.
En tout cas, moi on ne va pas me berner. Et je suis prêt à un débat contradictoire avec ceux qui aujourd’hui
racontent tout et n’importe quoi à notre peuple.
Mais je tiens à dire surtout à notre
jeunesse, c’est bien les réseaux sociaux, mais lisez lisez allez à la source des informations pour faire votre comparaison.
Même si vos parents sont peut-être décédés, mais je rappellerai que le gouvernement Soglo a pu permettre à beaucoup de continuer leurs
études grâce au payement des arriérés de salaire de plusieurs milliards de F.CFA.
Les Béninois doivent le reconnaître. Le gouvernement Soglo a pu éponger les arriérés de salaire sans oublier les pensions de retraite.
Tout ceci a permis au foyer d’envoyer leurs enfants à l’école et à l’université. Pour cela, il ne faut pas insulter l’intelligence des Béninois.
C’est comme si vous dites aujourd’hui aux Français que le général de Gaulle n’est rien. Mais tout le monde s’accorde à dire en France que ce soit de l’extrême-droite à l’extrême gauche
qu’il a fait la France.
Je voudrais saluer le peuple béninois. Je le dis
avec beaucoup de respect. Sans le peuple béninois qui s’est mis au travail en 1990, on aurait pas eu de résultats.
Je répète une fois encore que le père du Bénin moderne reste Nicéphore Soglo.
Si on était encore en démocratie, il y a des gens qui diraient aujourd’hui comme on l’a dit à l’époque : « Pavé Mina Dua » 1, on allait dire aujourd’hui « Hali Mina Dua».2
C »est de ça dont il s’agit, car les gens ne mangent plus à leur faim et quand vous racontez aux gens que c’est à cause du Niger, du Nigéria, du Togo que nos surplus de maïs et autres sont chers.
Dites-moi Marcel et Titus quand il a été question de lutter contre l’exportation de soja qu’est-ce qui s’est passé dans ce pays?
N’a-t-on pas vu un maître tout-puissant mettre des pierres sur les voies pour empêcher nos paysans d’aller vendre au Togo?
Si tous ces actes ont été posés pour empêcher les paysans d’aller vendre au Togo, c’est que quelqu’un de puissant a donné des ordres.
Propos recueillis par Marcel ZOUMÈNOU et Titus FOLLY
1- « Pavé Mina Dua »
Une maxime en langue Fon pour dire : « Les voies pavées ne remplacent pas la nourriture».
2- « Hali Mina Dua». « Les voies goudronnées ne remplacent pas la nourriture.»
Dans l’un ou l’autre cas, les infrastructures de transport ne doivent être vantées au moment où le peuple a faim.
Site lafriqueenmarche du 17 juin 2024 No 674